L’idée n’est pas de moi. Elle vient de ma lecture du moment, Pisser dans les cours d’eau, de Serge Haston. La revue Invendable, qu’il co-édite avec plusieurs autres journalistes, raconte les dessous de leurs reportages. Tout ce qui n’est pas montré dans les articles vendus et publiés ailleurs, des voyages et des personnages qui se seraient autrement perdus entre les pages d’un carnet Moleskine.
Je pense que c’est une limite du journalisme classique: l’essentialisation des personnes que nous rencontrons. Lorsque nous les écrivons, nous les réduisons à une fonction, à une action; ils n’existent dans un article que pour illustrer un propos et c’est parfois frustrant pour moi de ne pas être capable de les décrire comme je les ai vus. L’après-publication rend les choses encore plus bizarres. Soyons francs, il est rare que nous nous revoyons autour d’un café ou d’un verre pour prendre des nouvelles. Une fois l’article paru, chacun trace son chemin - il y a bien quelques exceptions, mais elles sont trop rares. La plupart du temps, le texte publié constitue le seul souvenir qu’il me reste de mes “sujets”, encore plus si nous n’avons pas échangé nos réseaux sociaux.
Voilà d’où me vient l’envie de raconter les dessous de mes articles, même s’ils ne me mèneront pas à Pétaouchnok. J’aimerais en conserver une trace, et si elle peut en intéresser certains, c’est tout bénéf’. N’oublions pas l’aspect promo de mon travail. Tous les jeudis à 18h, Carnets de reportages se fraiera un chemin dans votre boîte mail.
Les articles desquels je raconterai les dessous ne seront pas forcément des reportages, mais “Carnets d’articles” c’est quand même beaucoup moins stylé.
Pour lire les parties précédentes:
Lorsque vous recevrez cette newsletter, l’article sur les cueilleuses chinoises sera publié dans le numéro de Society paru ce mercredi (le 255). Foncez l’acheter !
Les cueilleuses chinoises de Paris
Partie 3
Je me réveille en vie. Et bien content de pouvoir dire à mon amie médecin que non, ce n’était pas de la colchique mais bien de l’ail des ours que j’ai mangé hier soir. Ce petit goût oignonneux ne trompe pas. J’envoie un message à Ieong pour la remercier de m’avoir permis de les accompagner, elle et ses copines, hier, et lui dis que miam miam miam, l’ail des ours dans les nouilles c’est une régalade. Réponse : « 👍❤️ »
Ce vendredi, je suis invité à une table ronde à la Cité des sciences autour du workshop “cueillette et place des plantes comestibles dans la ville”, avec Fabien et Flaminia, les deux chercheurs qui m’ont mis sur la piste des cueilleuses chinoises. Nous nous installons dans une salle de taille moyenne, autour de longues tables en bois clair montées sur roues. Les gamins ont l’air de s’éclater dans l’expo, un étage plus bas, parce qu’on entend presque que leurs cris. Ceci dit, ils peinent à couvrir le bruit intermittent des travaux, d’assourdissants “ding ding” métalliques, comme si quelqu’un frappait sur une barre de fer creuse avec un marteau. Le moins qu’on puisse dire, c’est que l’endroit est animé.
Un goûter est prévu pour les participants - j’adore ça, les goûters -, et j’ai bien besoin d’une gros verre de café en carton recyclé pour tenir une après-midi qui s’annonce compliquée: la dame du traiteur chinois a volontairement blindée mon assiette de ce midi en pensant que ça me ferait plaisir. (Je l’adore.) La digestion risque de me terrasser si je ne fais pas attention. À moins que le thermos ne s’en charge en premier, parce que je n’arrive pas à comprendre comment il fonctionne et je meurs de honte en le tripotant sous tous les sens. C’est un échec total. Je me rassois et attends que d’autres aillent se servir, triturent l’objet jusqu’à comprendre son mécanisme, et une fois que le café coule à flot, je file me servir.
Autour des tables, nous sommes à peine une dizaine. Je pensais que le format serait similaire à la conférence que Fabien avait donnée en novembre, avec un public qui pose des questions et que nous serions un panel à leur répondre. Mais la présentation des résultats de l’enquête “les migrantes chinoises et la cueillette des plantes dans les espaces verts du Grand Paris, enquête sur les usages populaires de la nature dans la ville dense” par Fabien et Flaminia nous est exclusivement dédiée, chanceux que nous sommes. Les deux chercheurs stars enfilent leurs micros Madonna - j’ai appris le terme ce jour-là - et commencent une présentation qui ressemble, peu ou prou, à ce que Fabien avait déjà déroulé en novembre. Une attention particulière est apportée aux problématiques que rencontrent les gestionnaires des espaces verts, qui représentent plus de la moitié des invités du jour. Une fois la présentation bouclée, Fabien et Flaminia proposent un tour de table. Chacun se présente, et une fois la phase alcooliques anonymes passée, nous nous balançons des questions en l’air auxquelles chacun essaie de répondre. Les débats s’orientent rapidement vers la réglementation des parcs, l’impact de la cueillette sur la biodiversité, le comportement des “écogardes” - je découvre ce mot - envers les cueilleuses, les activités que les institutions pourraient proposer pour se connecter à ce public… Les échanges débordent sur l’heure prévue, et à 17h, quand la discussion s’enlise dans des considérations techniques qui me dépassent franchement, je plie bagages.
Pendant la table ronde Ieong m’a envoyé une capture d’écran: “prunier sauvage ou prunellier ? Comment les reconnaître ?”, car nous nous étions gentiment chiqués devant un prunier (ou prunellier ?), lors de notre rando-cueillette.
En sortant de la Cité des sciences, je traverse le parc de la Villette. Le soleil est de sortie et égaie ma balade du retour. Je ne peux pas m’empêcher de remarquer les pissenlits qui poussent absolument partout. Ils semblent avoir envahi l’endroit.
Je pense en avoir fini avec la partie collecte d’informations du papier, et me dis qu’enfin, je vais pouvoir passer la semaine le cul vissé sur mon canapé à me triturer les méninges sur l’écriture. C’est un peu chiant, les articles, parce qu’ils obéissent à des règles assez strictes sans qu’elles ne soient clairement énoncées quelque part. Il faut savoir quel “modèle” adopter pour quel sujet, comment articuler ses blocs thématiques, quelle progression on va utiliser, qui deviendra le personnage principal et les secondaires... Personnellement, je travaille plus à l’instinct, c’est-à-dire que j’ai déjà une idée de la structure de mon papier avant de le coucher sur papier. Mais l’instinct, ça s’entretient. Ça s’émousse, aussi. Six mois que je n’ai pas écrit de papier, je vais avoir besoin d’un peu de temps pour que mes réflexes reviennent.
Je ne sais pas trop comment ils s’y sont pris, chez Society, mais on m’annonce dans la semaine que je suis en binôme avec un photographe. J’apprends que l’article doit être rendu la semaine prochaine. Il faut donc organiser un shooting au plus vite, et étant le seul en contact avec les cueilleuses, c’est à moi d’organiser ça. Heureusement, Ieong n’est pas timide. Elle accepte immédiatement qu’on se retrouve dans le bois de Vincennes. Je fixe le rendez-vous en fin de matinée et propose au photographe, qui m’a fait remarquer qu’une seule personne à shooter ce n’est pas l’idéal, de se retrouver au parc de Belleville à 8h du mat pour l’ouverture. On partira à la pêche à la cueilleuse, peut-être qu’avec un peu de chance… J’ai croisé des agents de sécu la veille, et selon eux, les femmes se pointent avant leur prise de poste à 10h.
Le réveil à 7h du mat’ pique. C’est encore plus difficile de sortir du lit en se disant qu’il y a une chance qu’on fasse tout ça pour rien. Je déteste laisser la place au hasard.
Aliocha arrive en vélo. Il a l’air d’avoir eu autant de mal que moi à se lever. Le parc est désert, on tente de prendre les petites allées, des fois que des cueilleuses s’y cacheraient, mais non, il n’y a rien. Pour l’instant. Nous montons au belvédère, je me dis qu’on y aura une meilleure vue du parc et peut-être que nous spotterons quelque chose d’ici, Aliocha avec ses yeux d’aigle et moi à travers mes épais verres de lunettes censés corriger ma myopie de taupe.
Aucun de nous n’a mangé ce matin, et il fait grand faim, nous décidons donc de nous accorder une petite pause boulangerie après avoir veillé sur le parc comme deux gargouilles de Notre-Dame. Renquinqués, nous décidons d’arpenter le parc. Il y a des petits chemins difficiles à observer depuis notre tour de guet. Sur le parvis, nous croisons une jardinière. J’avais tenté d’en interroger une, la dernière fois que j’étais venu, mais je m’étais heurté à un mur. Celle-là est autrement plus sympathique, d’autant plus qu’elle lit Society et qu’elle nous dit adorer le magazine. Elle nous renseigne du mieux qu’elle peut et nous redirige vers son chef, qui aura sans doute plus de choses à dire qu’elle sur le sujet. Le dit-chef est beaucoup moins sympathique. Dans son bureau, nous écopons d’une sèche fin de non-recevoir. « Nous, on ne peut pas vous parler, enfin parler aux journalistes. Je ne répondrai pas à votre interview. » Son visage se ferme encore plus lorsque j’essaie de lui expliquer qu’on ne demande pas une interview formelle, mais plus quelques infos sur le parc et ses usagères, quoi. C’est vraiment casse-couilles, de ne pas pouvoir aborder les gens qui bossent pour leur poser des questions sur leur métier. Genre tout le monde signe des accords de confidentialité maintenant, même les jardiniers ?
J’espère que nous n’avons pas mis la jardinière dans la merde, parce que la première chose que j’ai annoncée pour me présenter à son chef c’est: « Euh oui euh bonjour, on est journaliste pour Society c’est votre apprentie qui nous a dit de venir vous trouver euh vous connaissez les cueilleuses chinoises ? »
En remontant vers le belvédère, on croise une tata chinoise. Puis deux, trois... Aliocha me demande si je ne veux pas aller les aborder. Peut-être qu’elles cueillent ? Je déteste faire ça, ça me rappelle les micro-trottoirs qu’on nous forçait à faire en école de journalisme. En plus avec mon niveau de chinois catastrophique, je suis certain de ne pas me faire comprendre, ou de bégayer. Je lui aurais bien répondu « bah va le faire », à Aliocha, mais il ne parle pas du tout chinois, lui.
Du coup je me lance. « Nihao ayi ! », et j’essaie de lui demander, maladroitement mais avec toute la bonne volonté du monde, si, à tout hasard, elle ne connaîtrait pas des gens qui cueillent dans le parc, en espérant qu’elle me réponde que oui, elle en connaît, et que ça tombe bien, elle même est une cueilleuse d’enfer.
Avant de continuer, faisons un rapide point linguistique. Vous vous rappelez peut-être, ou pas du tout, que je m’étais fait un petit lexique autour du vocabulaire de la cueillette pour préparer ce sujet. Je n’avais réussi à en retenir que deux mots, pas forcément les plus utiles : “pissenlit” et “plante”. Aussi surprenant que ça puisse paraître, le mot “cueillette” ne voulait pas s’imprimer, et ce n’était pas faute d’essayer. Mais à chaque fois que j’essayais de le prononcer, personne ne comprenait ! Je l’avais donc abandonné.
En vérité, je n’avais pas le bon mot.
Depuis le début, je disais quelque chose qui n’avait aucun sens.
“Cueillette”, l’activité, ne s’utilise pas. On parle de “cueillir” des fleurs, des plantes, des légumes, mais pas de “cueillette” à proprement parler. J’ai appris ça tout récemment. Maintenant, je comprends mieux pourquoi personne ne me comprenait, même quand j’utilisais Google traduction. Ne vous fiez pas aux applis ! Demandez à vos parents.
Revenons donc à notre récit. La première tantine abordée n’est pas loquace, elle m’éconduit rapidement. La seconde, du même groupe, a l’air beaucoup plus contente de me voir parce qu’elle me demande si je suis Chinois et qu’elle est surprise d’apprendre que je suis “yiban - yiban” (j’utilise “moitié-moitié” pour dire métisse, je trouve ça plus simple et plus marrant, et surtout, je ne connais pas vraiment le mot adéquat). Je crois qu’elle a compris ce que je lui demandais, car elle m’explique qu’elle ne connaît personne qui « fait ça » ici, mais que j’aurais peut-être plus de chance aux Buttes Chaumont. Aliocha est matrixé par l’élégance de ces dames, qui viennent dans le parc aux aurores pour faire leur gym, foulard au cou, gants satinés aux mains. Il demande s’il peut les prendre en photo et commence à les shooter pour son kiffe perso. Une autre arrive avec des sacs de navets. Aliocha a l’air de kiffer ce genre de détails. Dommage que ça ne soient pas des sacs de cueillette, nous disons-nous.
Il est encore tôt et le groupe grossit à vue d’œil. Nous décidons de rester un peu, surtout parce que la jardinière trop sympa nous a dit que les danseuses partaient parfois cueillir avant ou après leur activité. Aliocha a flashé sur l’esthétique de ces soixantenaires et je suis sûr qu’il y a quelque chose à creuser. Surtout qu’elles sont hyper sympas et plutôt loquaces - ce qui m’étonne un peu, je pensais qu’on allait se faire rembarrer sec.
Leur enceinte crache une musique chinoise plutôt douce. Elles se mettent à danser en parfaite harmonie, suivant une meneuse de groupe. Des gestes lents, précis, travaillés, polis après des années de pratique. Ce Just Dance dans la vraie vie est hypnotisant. Depuis le belvédère, on a une super vue. Elles baignent dans la lumière du matin. C’est hyper chaleureux, comme moment.
On se décide à aller faire un tour aux buttes Chaumont, quand même. On aura toujours le temps de revenir ici avant de rejoindre Ieong.
À cette heure-ci, les buttes sont déjà assez remplies. On se balade jusqu’à tomber sur un groupe de taichi plutôt blanc. Il y a des sacs accrochés un peu partout, on les scanne en espérant trouver des sacs de cueillette, mais rien. Un peu plus loin, on tombe sur un groupe de trois mémés chinoises sur un banc. Je recommence mon numéro: coucou tata, comment ça va ? dis moi, tu ne connaîtrais pas des gens qui cueillent ici ? En réponse, celle de droite crache un molard, celle de gauche tourne la tête, et celle du milieu m’explique qu’elles ne sont que trois vieilles femmes et me fait comprendre que je les fais chier. Du coup ouais, on se décide à retourner voir nos danseuses sympas. Après une s’être pris une dernière bâche sur la route, ça fait du bien de retrouver des gens contents de nous voir.
Les dancing queens
Les tantines ont l’air plutôt à l’aise avec l’appareil d’Aliocha. Il faut dire qu’elles se prennent souvent en vidéo en train de danser. En aparté, Yuanren, le seul mec du groupe, se montre assez loquace avec ses grosses lunettes de soleil sur le pif. Il nous montre des vidéos de danse filmées ici, où on le voit, un peu à l’écart, essayer de suivre les chorégraphies. Dans un très bon français, il nous explique avoir emménagé dans le coin il y a trente ans, mais n’avoir rejoint le groupe de danse qu’assez récemment. Le groupe de femmes devant nous vient ici tous les jours à heure fixe et l’activité est chapeautée par une association de tantines chinoises du coin. Je chope le contact de Yuanren en me disant qu’il y a peut-être un sujet à faire dessus. Mais il faudrait que je fréquente un peu plus ce cercle pour m’en assurer. Je croyais que Yuanren était le mari d’une femme du groupe, mais lorsque tout le monde s’en va, il rentre seul. Je n’avais pas fait très attention à ses mimiques. En y repensant, ça fait sens.
Nous avons rendez-vous avec Ieong à 11h30, à l’hippodrome de Vincennes. Sur le chemin, dans le bois, nous croisons un restaurant, ambiance “chalet dans la forêt”, et Aliocha, mort de faim, propose que nous y invitions notre star du jour pour le déjeuner. Ce que je m’apprête à écrire va sembler très “con de parisien”, mais l’ambiance du resto fait penser à un troquet de province où tout le monde se connaît et dans lequel les serveurs - et la serveuse - tapent la discussion comme si de rien n’était. Une fois notre déjeuner avalé, je propose de prendre en charge l’addition, que j’enverrai en note de frais au magazine. Lorsque le TPE affiche quatre-vingt balles, je prie de tout mon cœur pour que la dépense soit remboursée.
Ieong est toujours aussi joviale et bavarde, ce qui est franchement agréable. Elle se prête au jeu des photos tout en nous baladant dans le bois. Notre tata cueilleuse en imper rose se laisse diriger par Aliocha, met en scène sa cueillette, souffle sur un pissenlit pour en disperser les graines, étale ses outils dans l’herbe, pose dans un magnolia… On est un peu deg qu’elle n’ait pas ramené son canif, elle l’aurait paumé chez elle, nous avoue-t-elle. Elle s’excuse, un peu embarrassée. « Je suis une personne un peu bordélique. D’ailleurs, si vous venez chez moi après, je n’ai pas rangé… Mais bon, c’est qui je suis ! » On lui pardonne tout, à Ieong. Sa connaissance des plantes est toujours aussi épatante. Dans l’énorme parc de l’école Du Breuil, elle cueille quelques fleurs de citronnier qu’elle range dans une poche sur le côté de son sac. Elle nous a prévu un itinéraire aux petits oignons. La balade doit se terminer sur un spot de ciboule chinoise, sorte d’aromatique qui ressemble à la ciboulette. Lorsqu’Aliocha lui fait part de sa crainte de ne pouvoir rester jusqu’à la fin - il a un train à prendre -, Céline presse le pas comme si elle voulait absolument remplir “sa part du marché” avant la fin de la journée.
Elle avait bien le seum d’avoir perdu son couteau, parce que c’était beaucoup plus galère d’utiliser la truelle pour ça.
Après avoir déterré plusieurs plans de ciboule, nous prenons le bus direction Saint-Maurice, où Ieong habite. La banlieue est plutôt cossue. L’appart’ d’Ieong, moins. Il y fait sombre, frais (froid ?), et la peinture craquèle à trop d’endroits pour que je me souvienne d’où exactement. Ieong n’avait pas menti, c’est un gentil foutoir. La vaisselle déborde de l’évier, la table est pleine de bordel, et la maîtresse des lieux nous prie gentiment de ne pas regarder dans la pièce du fond, qui semble être autant sa chambre que son débarras. Un escalier monte dans des combles aménagés qui n’appartiennent pas à sa propriété, a récemment appris Céline, en bisbille avec la copro.
Préparation de la tisane
Elle nous ouvre la porte du frigo, qui ne marche pas, pour nous montrer son congélo, qui marche, dans lequel elle congèle les plantes cueillies. D’un geste, elle fait de l’espace sur le plan de travail et s’attèle à la préparation d’une tisane pousse de goji, baies de goji, longanes séchés, menthe. Pendant que l’eau chauffe, elle nous montre des photos de son pique-nique de dimanche à Sceaux, où elle s’est retrouvée avec sa famille sous les cerisiers en fleurs pour fêter Qingming, la Toussaint chinoise. Tout ce beau monde pose avec une ombrelle style japonais.
Lorsque la préparation est prête, elle nous la verse dans des tasses achetées en Espagne. Le goût n’est franchement pas mauvais. Il y avait une odeur bizarre, genre arrière-goût qui pourrait me donner envie de vomir, mais elle ne se sent pas en bouche. Franchement, c’est super. Aliocha et moi finissons notre tasse entière pendant que Céline nous abreuve d’anecdotes. Tous les deux, on a l’air de deux cadavres parce que la journée nous a tués : lui n’a pas beaucoup dormi cette nuit, et moi j’ai perdu l’habitude de me réveiller avant dix heures. Un gros coup de barre me sape mon énergie, sans doute la digestion de ma poêlée-kefta de ce midi. Aliocha regarde ses photos du jour et décide que c’est bon, il a ce qu’il faut. De toute façon, il doit filer, son train ne l’attendra pas.
Deux jours plus tard, Céline m’envoie une photo de son couteau. « Retrouvé. » Bien content pour elle !
C’est enfin la fin de cette loooooooongue série sur la cueillette et les cueilleuses chinoises de Paris !
Pour lire les précédents numéros de Carnets de reportages, cliquez ici.